Je regardai les enfants – mes enfants – sur le terrain en face de moi et je souris. J’adorais les regarder jouer et s’amuser comme ça. A cet âge là, on ne se prenait pas la tête, on prenait la vie comme elle venait. Et surtout les enfants avaient cette incroyable faculté à ne voir que le bon côté des choses. Leur innocence me faisait chaud au cœur et j’essayai de faire mon maximum pour qu’il la garde le plus longtemps possible. Chose que je n’ai pu malheureusement pas faire. Je ne regrettai pas ma vie. Les regrets, je ne savais pas ce que c’était. La vie m’avait déjà tout pris. Enfin presque. Parce qu’il me restait quand même ma famille de cœur. Laissant mon regard errait au delà des enfants, je repensais à la conversation que j’avais eu avec « Mummy » hier soir.
« Ça fait six ans Lizzie… Tu dois passer à autre chose. J’ai besoin de savoir que ma fille est heureuse… »A l’autre bout du fil se tenait Margareth Wilson. La femme la plus généreuse et la plus aimante que j’ai jamais vu. C’était elle et sa famille qui m’avait recueillie quand j’avais tout perdu. Petit animal blessé, j’avais passé les deux dernières années de ma vie muette, prostrée dans ma douleur. C’était elle, qui à force de patience et d’amour, m’avait fait revivre. Elle et Henri… Comme toujours, penser à lui, me fit l’effet d’un coup de poignard dans le cœur. Je savais qu’elle avait raison mais malgré tous mes efforts je n’y arrivais pas. Quand Henri avait disparut, une partie de moi avait disparu avec lui. La partie la plus importante et cette partie là, je ne l’avais jamais retrouvée. Alors comme toujours, je donnai le change à ma mère
« Mais je suis heureuse Mum… Ne t’inquiètes pas pour moi. J’ai une vie très bien ici… »Après quelques minutes de conversation, on avait raccroché mais j’avais parfaitement conscience que ma mère n'était pas dupe. Après tout c'était ma mère... Le problème c’est que je ne pouvais rien y changer. Je ne me voyais pas refaire ma vie comme Margareth le souhaiterait.
C’était à tout ça que je songeais. Pourtant, j’avais été sincère avec ma mère. J’étais aussi heureuse que je pouvais l’être ici. La vie que je menai me convenait parfaitement. Je me partageai entre mes enfants et les animaux du refuge animalier où j’étais bénévole. Et il y avait aussi les quelques amis que je m’étais fait durant les six dernières années. Je savais que ce n’était pas assez pour mes proches mais c’était le seul point sur lequel je ne pouvais pas les contenter. Et ils prenaient garde à ne pas trop m’en parler de peur de trop me braquer. Je n’avais pas un caractère des plus facile, je le savais. J’étais prête à tout pour les personnes que j’aime, je les ferai toujours passer avant moi mais je ne pouvais pas faire des choses à contre cœur.
Un cri me fit sortir de ma torpeur. Le ballon avait volé au-dessus du terrain et Johnny un de mes élèves était parti le chercher.
« Johnny ! Fais attention ! »Échangeant un regard avec ma collègue, je parti derrière lui. Au moment où je le retrouvais enfin, je l’entendis m’appeler pour me dire qu’il avait retrouvé le ballon.
« Reviens vite ! Je crois que les autres t’attendent avec impatience ! Et pour la dernière demi-heure, on va jouer avec vous ! »On sentait le rire dans ma voix. Les enfants m’appelaient par mon prénom parce que je trouvais que cela sonnait mieux. Je voulais qu’ils se sentent à l’aise avec moi et j’avais peur que « Maîtresse » soit trop formel pour eux. Tout en parlant, j’avançais toujours et c’est là que je vis qu’il n’était pas seul. Je me hâtai donc. On ne savait jamais sur qui on pouvait tomber. Je ne pensais pas si bien dire car lorsque je vis la personne qui était avec lui je stoppai net. La terre commença à tourner autour de moi et je senti mes jambes se dérobaient.
« Henri… »Je voulus faire un pas mais mes jambes ne m’obéissaient plus et je me retrouvai assise dans l’herbe à essayer de retrouver mon souffle.
EMI BURTON